Qualité du motard lors de l'accident et incidence sur l'indemnisation

Le motard qui chute garde sa qualité de conducteur

La Cour de cassation a rendu, ce 24 mars 2016, une décision particulière relative à un accident mortel de la circulation. A la lecture de cet arrêt, le motard qui tombe au sol conserve sa qualité de conducteur, ainsi les fautes commises par ce dernier permettent la limitation ou l'exclusion de l'indemnisation de ses ayants droits.

Avant l'achat d'un véhicule un motard décide de l'essayer il s'agissait ici d'une moto de grosse cylindrée. Alors qu'il roule ce dernier chute soudainement de son véhicule. Malheureusement avant qu'il ne puisse se relever une camionnette arrivant en sens inverse le renverse.

Ses ayants droit se portent alors en justice afin d'obtenir une indemnisation du préjudice. Cette demande est rejetée en appel.


En effet il ressort de la lecture des procès-verbaux et de l'écoute des différents témoignages que la chute du motard ne pouvait s'expliquer ni par un malaise, ni par un excès de vitesse, ni par un problème mécanique. De plus la cour retient que l'accident s'est déroulé dans un laps de temps extrêmement court, le conducteur de la cylindrée n'ayant pas glissé sur le sol, dès lors selon cette dernière, il garde sa qualité de conducteur au moment de l'accident.

Avec ces éléments la cour d'appel en déduit que l'accident n'a pu survenir que du fait d'une faute du conducteur de la moto qui a perdu le contrôle de l'engin sans raisons, or en cas de faute du conducteur la loi du 5 juillet 1985 est très claire : l'indemnisation peut être limitée ou exclue.

La cour a donc raisonné par élimination au regard des circonstances pour en déduire que l'accident avait pour cause exclusive une faute de la victime, ce dernier ayant la qualité de conducteur perdait ainsi son droit à l'indemnisation, indemnisation réclamée par ses ayants droit en l'espèce.

Ces derniers forment un pourvoi, rejeté par la Cour de cassation qui confirme tout d'abord cette qualité de conducteur en énonçant que « la chute du conducteur de la moto sur la chaussée puis sa collision avec le véhicule s'étaient succédé dans un enchaînement continu et dans un laps de temps extrêmement bref, de sorte qu'il s'agissait d'un accident unique et que la victime n'avait pas perdu la qualité de conducteur ». Elle poursuit en énonçant que la victime « avait emprunté une route plate, bidirectionnelle, mouillée, alors qu'il tombait une pluie fine, et qu'il avait perdu le contrôle d'une moto de forte cylindrée qu'il pilotait pour la première fois, la cour d'appel a pu décider que la chute du motard résultait d'une perte de la maîtrise lui permettant de garder en toute circonstance le contrôle de sa moto, et ainsi caractériser sa faute ».


La Cour de cassation valide donc le raisonnement de la cour d'appel. La victime, ayant qualité de conducteur au moment de l'accident, perd donc son droit à l'indemnisation réclamé par ses ayants droit.

Malheureusement pour les ayants droit de la victime si cette dernière avait été renversée après un laps de temps plus long, en ayant glissé sur le sol par exemple, cette dernière aurait pu avoir la qualification de piéton. Dans ce cas de figure sa faute, à moins qu'elle ne soit inexcusable ce qui est rarement le cas, n'aurait eu aucune incidence pour l'indemnisation. C'est donc une appréciation des faits par les juges qui semble sévère en ce qu'elle prive les ayants droit de toute indemnisation.