Une grille d'évaluation "jurisprudentielle" pour déterminer la fraude à l'assurance

Pour déceler l’existence d’une fraude à l’assurance, l’assureur est tenu d’en apporter la preuve. Pour ce faire, il peut faire des enquêtes privées en vue de déterminer la mauvaise foi de l'assuré. Toutefois, cette procédure d’enquête ne doit pas empiéter sur la vie privée de l’assuré.

Détermination fraude assurance

La jurisprudence actuelle a posé un cadre de conformité du respect de la vie privée de l'assuré par son assureur lors d'une enquête, afin de déceler l'existence d'une fraude. La Cour de cassation a été amenée à poser les conditions de validité d'une investigation privée à l'encontre d'un assuré, tout en respectant ses droits fondamentaux.

Pour la 1ère fois dans un arrêt du 31 décembre 2012, la Cour a énuméré des critères permettant de justifier qu'une investigation, menée pour l'assureur, n'outrepasse pas les limites de l'atteinte à la vie privée de l'assuré. En principe, l'assuré bénéficie de la présomption de bonne foi. De fait, l'assureur est tenu d'apporter la preuve du « mensonge » pour faire tomber la présomption de l'assuré.


Dans cet arrêt, la Haute juridiction est venue rappeler que le non-respect de la vie privé de l'assuré peut remettre en question les résultats des investigations menées au nom de l'assureur. De plus, elle va donner une « grille d'évaluation » pour déterminer si l'enquête menée par l'assureur est en adéquation avec les droits de l'assuré.

Elle estime que « les atteintes portées à la vie privé, sur la voie publique ou dans des lieux ouverts au public, sans provocation aucune à s'y rendre, et relatives aux seules mobilités et autonomie de l'intéressé, n'étaient pas disproportionnées au regard de la nécessaire et légitime préservation des droits de l'assureur et des intérêts de la collectivité des assurés ».

On peut donc déterminer 4 critères permettant de déterminer un cadre légal permettant pour l'assureur de pratiquer des investigations à l'encontre de son assuré :

  • Cette atteinte portée à la vie privé doit se faire sur une « voie publique ou dans des lieux ouverts au public ». Autrement dit, l'investigation privée se doit d'être effectuée dans un lieu public et il ne doit pas y avoir une immixtion dans la vie privée de l'assuré (ex : domicile, voiture, lieu de travail). 

  • L'enquête menée par l'assureur doit se faire « sans provocation aucune à s'y rendre ». Le but de l'investigation privée ne doit pas aboutir à piéger l'assuré, voire de le contraindre à faire quelque chose qu'il n'est pas en mesure de faire. Concrètement, cette enquête doit se faire sous forme d'une « observation proportionnée » à l'encontre de l'assuré.

  • Cette atteinte est « relative aux seules mobilités et autonomie de l'intéressé ». De fait, l'investigation ne doit permettre de relever que les éléments de preuve nécessaires à déterminer la fraude à l'assurance. Cela doit se limiter à apporter la preuve essentielle pour que l'assureur puisse déceler la mauvaise foi de son assuré. 

  • Le dernier critère repose sur la durée des investigations. Dans les faits, l'investigation avait eu lieu pendant une durée de trois jours. Pour la Cour, ce délai d'investigation est jugé comme raisonnable. Dans un arrêt du 25 février 2016, la Haute juridiction avait sanctionné des investigations jugées comme longues et portants atteintes à la vie privée de l'assuré.


Cette grille de critères a été confirmée par la suite dans l'arrêt rendu le 22 septembre 2016. La Cour avait estimé que « les opérations de surveillance avaient concerné l'intérieur du domicile […] cette immixtion dans leur vie privée excédait les nécessités de l'enquête privée ».

Un cadre d'investigation légal qui permet aux investigateurs d'assurance de mener leurs enquêtes en adéquation avec les droits fondamentaux protégeant les assurés. La non-immixtion dans la vie privée de l'assuré est protégée par les articles 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales .