Assurance-vie : un enfant biologique sans filiation peut-il réclamer le capital ?

Question de Samir (Lille, 59)
Mon père biologique, qui ne m'a jamais légalement reconnu, vient de décéder. J'ai découvert qu'il avait souscrit un contrat d'assurance-vie mais qu'aucun bénéficiaire n'était désigné dans le contrat. Puis-je réclamer tout ou partie de cette somme sachant qu'il était marié et qu'il avait une fille ?
Le bénéficiaire peut-il être l'enfant biologique qui n'a pas été reconnu ?
Il est en effet possible que lors de la souscription d'un contrat d'assurance-vie, l'assuré souscripteur ne désigne pas le bénéficiaire du capital garanti. Dans ce cas, le souscripteur peut désigner son bénéficiaire plus tard. De toute évidence, votre père biologique n'a pas eu le temps de le faire.
La désignation peut être faite directement dans le contrat, par un avenant ou dans un testament. Il faut donc vérifier que le bénéficiaire du contrat ne soit réellement désigné nulle part.
En absence de bénéficiaire clairement désigné, l'article L.132-11 du Code des assurances prévoit que le capital ou la rente garantis font partie du patrimoine ou de la succession de l'assuré.
Normalement, le capital d'un contrat d'assurance-vie n'a pas vocation à intégrer la masse successorale c'est-à-dire l'actif des biens de votre père que ses héritiers devront se partager. Mais en absence de bénéficiaire identifié, le capital sera intégré dans les biens de votre père et partagé entre les héritiers.
L'article L.132-8 ajoute que « les héritiers ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l'assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession ».
Ainsi, si vous souhaitez obtenir le versement de tout ou partie du capital de l'assurance-vie de votre père biologique, il faudra que vous soyez déclaré comme héritier à sa succession au même titre que sa fille et sa femme.
Comment exercer vos droits à la succession ?
Pour vos droits à la succession de votre père et en absence de reconnaissance de paternité de sa part, il faudra que vous prouviez votre filiation conformément à l'article 310 du Code civil et suivants.
Pour cela, il faut saisir le Tribunal de grande instance de votre domicile afin de faire reconnaître votre lien de filiation judiciairement parlant.
Bien sûr, il faut apporter la preuve de ce lien. Le Code civil prévoit que la filiation du père ou de la mère peut être prouvée par :
- Acte de naissance établissant le lien de filiation ;
- Acte de notoriété (reconnaissance de paternité devant notaire par exemple)
- La possession d'état. Elle doit respecter certaines conditions pour être établie et répond à une prescription de 10 ans à compter de la majorité de l'enfant soit jusqu'à vos 28 ans.
Désormais, il est également possible de demander à ce qu'un test ADN (expertise génétique) de paternité soit effectué aux fins d'établissement d'une filiation. Cependant, lorsque le parent présumé est décédé, une loi bioéthique d'Aout 2004 interdit toute manipulation des empreintes génétiques d'une personne sans son consentement.
Ainsi, l'article 16-11 du code civil prévoit qu'en absence du consentement de la personne manifesté de son vivant, aucune identification ne peut être réalisée après sa mort. Si votre père n'a jamais consenti à ce que votre lien de filiation soit prouvé ou établi, vous ne pourrez pas demander une expertise génétique.
Votre dernier recours sera de faire établir votre lien de filiation par le biais de votre sœur, mais il faudra alors qu'elle donne son consentement exprès à cette demande qui vous permettra de devenir successible. Dans le cas contraire, il vous sera impossible d'être intégré à la succession et donc de réclamer ne fusse que le capital de l'assurance-vie.