Exigence de bonne foi et renonciation d’un contrat d’assurance-vie

La Cour de cassation a rendu ce 19 mai 2016 une décision très intéressante. La Haute juridiction est en effet venue étendre l'obligation de bonne foi du souscripteur d'un contrat d'assurance-vie voulant renoncer à ce dernier, prévu par l'article L 132-5-2 du Code des assurances, aux contrats conclus avant l'entrée en vigueur de ce texte le 1er janvier 2015.
Un couple de particuliers souscrit en Juin 2008 une assurance-vie libellée en unités de compte sur laquel ils investissent la somme de 1 503 057, 25 €. En mars 2009 ils procèdent à un rachat partiel de 344 500 € chacun.
En octobre 2010 ces derniers exercent, par lettre recommandée avec accusé de réception, leur faculté de renonciation au contrat d'assurance-vie au motif d'une information contractuelle non conforme aux exigences légales. L'assureur leur refuse l'exercice de ce droit et les particuliers l'assignent alors en restitution du capital et des intérêts majorés.
En appel la cour donne raison aux particuliers, selon elle le défaut d'information permet bien de proroger l'exercice du droit de renonciation du souscripteur du contrat, retenant que « la faculté de renonciation prévue par le Code des assurances est un droit discrétionnaire pour l'assuré dont la bonne foi n'est pas requise, qu'il soit averti ou profane et ne peut donc dégénérer en abus ». Selon cette dernière pas d'abus donc, le contrat ayant été conclu avant le 30 décembre 2014 la recherche de la bonne foi n'est pas nécessaire et l'existence d'un manquement dans la délivrance de l'information permet au souscripteur d'exercer sa faculté de renonciation dans un délai de 30 jours après la réception de l'information exacte.
L'assureur forme alors un pourvoi devant la Cour de cassation. Les juges vont donner raison à la société dans un attendu très clair dans lequel ils énoncent « Qu'en se déterminant ainsi, par voie de simple affirmation, en se bornant à constater que les conditions d'exercice du droit de renonciation étaient réunies, sans rechercher, au regard de la situation concrète [des souscripteurs], de leur qualité d'assurés avertis ou profanes et des informations dont ils disposaient réellement, quelle était la finalité de l'exercice de leur droit de renonciation et s'il n'en résultait pas l'existence d'un abus de droit ».
Si depuis l'entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2014 la rédaction du nouvel article L 132-5-2 dispose précisément que l'exercice de cette faculté de renonciation au contrat n'est ouvert qu'à l'assuré de bonne foi, cette dernière n'était pas recherchée par les juges pour les contrats conclus avant cette date.
En rendant une telle décision les juges de la Haute juridiction étendent cette obligation de bonne foi aux souscripteurs de contrats plus anciens. En l'espèce il est clair que les particuliers n'étaient pas profanes mais bien des souscripteurs avertis, se servant d'un manquement de forme dans la rédaction du contrat afin d'échapper à la fluctuation des capitaux placés sur le contrat souscrit.
Avec cette décision, qui semble juste et logique, la Cour de cassation encadre donc cette faculté de renonciation, en faisant peser une obligation de bonne foi aux souscripteurs de contrats antérieurs au 1er janvier 2015. Si certaines juridictions du fond avaient peu à peu commencé à admettre cette solution, la Cour de cassation met un terme aux interrogations en validant ce raisonnement.