Le préjudice écologique fait son entrée au Code civil

Depuis le procès Erika, définitivement jugé en 2012, la Cour de cassation avait reconnu la notion de « préjudice écologique ». Pour de nombreux acteurs politiques et citoyens il était nécessaire d'inclure cette notion dans le Code civil. C'est chose faite avec l'adoption en lecture définitive par l'Assemblée nationale du texte de la loi sur « la reconquête de la biodiversité » le 20 juillet 2016. À cette occasion le livre III du Code civil sera désormais doté des articles relatifs à cette notion.
Le travail de l'Assemblée et notamment les amendements des groupes socialistes, écologistes et radicaux de gauche ont permis l'adoption de la mesure : le « préjudice écologique » sera bien inscrit dans le Code civil.
Ce principe est d'origine jurisprudentielle, et notamment en l'état fortement inspiré de la jurisprudence Erika, bien que la doctrine ait déjà pointé du doigt la nécessité de mettre en place un mécanisme permettant la réparation de l'atteinte à un intérêt collectif notamment et surtout un préjudice écologique.
Le principe est simple tel qu'il est définit dans le premier article (article 1246) « Toute personne responsable d'un préjudice écologique est tenue de le réparer ». Le troisième article dispose pour sa part que « L'action en réparation du préjudice écologique est ouverte à toute personne ayant qualité et intérêt à agir, telle que l'État, l'Agence française pour la biodiversité, les collectivités territoriales et leurs groupements dont le territoire est concerné, ainsi que les établissements publics et les associations, agréées ou créées depuis au moins cinq ans à la date d'introduction de l'instance, qui ont pour objet la protection de la nature et la défense de l'environnement »(article 1248).
Ainsi dès qu'une atteinte à l'environnement serait constatée, qu'elle soit l'œuvre d'un professionnel ou d'un particulier (« toute personne responsable » article 1246), toute personne ayant un intérêt à agir, à la lecture du présent texte, pourra déclencher une action en réparation de ce préjudice. Cette réparation devra être effectuée en priorité en nature, néanmoins il est prévu que lorsque ce ne sera pas possible que cette réparation soit faite par le biais du versement de dommages et intérêts qui seront prioritairement affectés à la réparation de l'environnement (article 1248), ainsi qu'à sa protection.
Le délai de prescription est de « dix ans à compter du jour où le titulaire de l'action a connu ou aurait dû connaître la manifestation du dommage. »
Cette loi sera soumise à une double entrée en vigueur : une première à la publication de la loi et une seconde au 1er octobre 2016 (entrée en vigueur du nouveau Code civil), il est néanmoins précisé que ces dispositions ne pourront s'appliquer aux préjudices qui, avant la publication de la loi ou le 1er octobre, ont déjà donné lieu à une action en justice.
Avec ces nouvelles dispositions, largement saluées au regard de l'intérêt commun qu'elle cherche à protéger, ce sont aussi les assureurs qui vont devoir repenser leurs garanties en matière d'atteinte à l'environnement. En effet le régime de responsabilité étant étendu, ces derniers devront certainement revoir leurs régimes de garanties et les personnes, surtout professionnelles, à qui elles les accordent.