Défaut d’entretien, assurance, absence d’aléa et dol

La cour de cassation, dans un arrêt du 24 mars 2016, a rendu une décision intéressante concernant la différence entre le dol et le défaut d'entretien, ainsi que sur l'appréciation de l'absence d'aléa à propos d'un litige entre une copropriété et son assureur.

Dol, absence d'aléa et assurance

En l'espèce un syndicat de copropriétaires avait souscrit une assurance multirisque non occupant auprès d'un assureur. Cette dernière garantissait un certain nombre de dommages ainsi que la responsabilité civile du syndicat. Environ trois mois après la souscription de ce contrat un mur de la copropriété, qui séparait la copropriété d'un jardin public, s'était effondré. Une expertise judiciaire avait alors permis de mettre en évidence que cet effondrement résultait, entre autres, d'un défaut d'entretien du syndicat ayant provoqué une infiltration d'eau menant à l'effondrement.

La commune avait alors assigné le syndicat en réparation des préjudices subis, et notamment pour la prise en charge des frais de reconstruction du mur. La cour d'appel saisie du litige avait alors condamné le syndicat et son assureur in solidium, c'est-à-dire chacun pour le tout.


L'assureur avait alors formé un pourvoi en cassation. En effet selon lui le contrat d'assurance habitation était « dépourvu d'aléa et nul faute d'objet ». Selon l'assureur ce défaut d'entretien était antérieur à la souscription du contrat de sorte « que le sinistre était, à cette date, inévitable et ne présentait pas un caractère aléatoire ». En outre l'assureur estimait que le syndicat s'était rendu coupable de dol en ne l'avertissant pas de ce défaut d'entretien au moment de la conclusion du contrat, ce qui justifiait, selon lui, l'annulation du contrat d'assurance.

La Cour de cassation est venue rejeter ces deux arguments. Elle adopte tout d'abord une vision stricte de l'absence d'aléa estimant simplement que « le mur s'était effondré pendant la période de validité du contrat à raison d'infiltrations » qui, même si elles existaient de longue date, ne suffisaient pas à faire disparaître le caractère aléatoire du sinistre. La Haute juridiction estime donc qu'un défaut d'entretien de l'assuré ne peut suffire à supprimer l'aléa et donc éviter la mise en jeu de la garantie de l'assureur.

C'est donc sur le deuxième moyen, la caractérisation du dol, que doit se placer l'assureur pour obtenir l'annulation du contrat. A ce propos la Cour de cassation énonce que la cour d'appel a justement « retenu que le sinistre n'était pas dû à une faute intentionnelle du syndicat mais uniquement à un défaut d'entretien ». En effet, afin que soit reconnue une réticence dolosive, l'assureur aurait dû prouver que le syndicat avait connaissance de ce défaut d'entretien et du risque qui lui était attaché et qu'il avait volontairement dissimulé ce dernier à l'assureur dans le but de le pousser à contracter. Or la Cour de cassation retient finalement que le simple défaut d'entretien ne suffit pas à caractériser ces éléments.


Il résulte donc de cette décision de la Cour de cassation que le défaut d'entretien de l'assuré ne suffit en aucun cas à caractériser l'absence d'aléa ou le dol et donc la nullité du contrat. Dès lors ce dernier ne suffira pas à écarter la garantie de l'assureur mais pourra simplement éventuellement réduire son indemnisation. Il appartient donc à l'assureur de prévoir contractuellement une obligation d'entretien qui pèserait sur l'assuré afin de pouvoir espérer voir sa garantie écartée dans ce cas figure.