Le gouvernement a récemment fait pression sur le groupe PSA pour qu’il renonce à transférer certains de ses ouvriers polonais à Hordain (Nord). Ils étaient supposés renforcer les effectifs sur place et accélérer la reprise de la production. Le constructeur a fini par céder, malgré l’urgence de la situation et l’importance de cette démarche pour le redémarrage de son activité.

L’industrie automobile relance les débats sur la solidarité européenne en pleine crise du Covid-19

En raison d'une décision stratégique de PSA, l'ex Sevelnord (Société européenne des véhicules légers du Nord) s'est retrouvée au centre de vives polémiques ces dernières semaines. Le constructeur souhaitait en effet importer des ouvriers venant de ses autres unités de production. Selon ses détracteurs, cette démarche priverait d'emploi les intérimaires français au profit des travailleurs polonais.

L'usine en question s'étend sur deux communes, Hordain et Lieu Saint-Amand. Elle est dédiée à l'assemblage de VUL (véhicules utilitaires légers) et de VP (voitures particulières). Par ailleurs, le site produit des voitures pour plusieurs marques incontournables en assurance auto, à savoir Peugeot, Opel, Citroën, Toyota et Vauxhall.

Une question de solidarité européenne

Même si la démarche est assez déconcertante, l'initiative du groupe PSA est justifiée pour le Medef, face au contexte actuel et aux spécificités de cette structure. Le constructeur doit en effet prendre des décisions en fonction de la situation de l'ensemble de sa chaîne de production. Les transferts entre sites ne sont donc pas à exclure dans le cadre de sa stratégie globale.


Comme l'a noté Geoffroy Roux de Bézieux, président du Medef :

On serait en France, il y aurait une usine en sous-activité à Montbéliard et une usine en suractivité à Hordain, on déplacerait les gens pour trois mois, ça ne poserait pas de problème. Là, c'est parce qu'il y a des frontières entre les deux…

Il ajoute que la réaction de l'exécutif tend à remettre en question l'idée de solidarité européenne. Il s'agit pourtant d'un principe important sur le Vieux Continent, au même titre que l'harmonisation fiscale et sociale entre ses pays.

Dans cette optique, Geoffroy Roux de Bézieux a déjà milité pour la mise en place d'un SMIC à l'échelle européenne. Selon lui :

L'idée du SMIC européen, qui serait un SMIC en pourcentage du salaire médian, c'est une idée à laquelle il faut réfléchir.

Un changement de perspective indispensable

La position du Medef a suscité les mêmes réactions que l'idée initiale de PSA. Les critiques concernent notamment la protection de « l'emploi des Français ». Selon les détracteurs du projet, l'industriel a des obligations envers les contribuables en raison des fonds publics débloqués pour son sauvetage. Suivant cette logique, toute opinion contraire va à l'encontre de l'intérêt du pays.

Geoffroy Roux de Bézieux a souligné dans Le Grand Jury :

Je comprends l'émotion que ça a pu susciter. […] Mais, c'est un sujet complexe, parce que c'est un sujet de solidarité européenne.

Autrement dit, le problème doit être abordé sous une perspective plus large, surtout avec un groupe de la taille de PSA. La France doit par ailleurs apporter sa contribution face à la crise actuelle, en tant que membre à part entière de l'Union européenne.

Comme l'a expliqué celui qui préside de Medef :

Ces salariés-là, ils sont en sous-activité en Pologne, et le risque, c'est qu'il y ait un plan de licenciement en Pologne […] Si chacun se replie sur son égoïsme national, on n'y arrivera pas.

De plus, PSA avait prévu de payer les ouvriers polonais aux normes salariales françaises. Ainsi, le groupe ne peut pas être accusé de dumping social.