Tel un phénomène de mode, de plus en plus de Franciliens adoptent des chiens de type molossoïde, comme le Staffordshire bull terrier. Seulement, la loi estime qu’ils peuvent représenter un danger pour les personnes qui les entourent. Quant aux refuges, ils espèrent que la réglementation sera plus clémente par rapport à leur adoption, les centres étant saturés.

En France, les agressions commises par des molosses tendent à s'accroître. Par exemple, au mois de novembre dernier, trois attaques ont été enregistrées. Il arrive que les policiers soient obligés de tirer sur ces chiens pour stopper la menace.
En vertu de la loi du 6 janvier 1999, nul ne peut donner ni acheter des chiens d'attaque (première catégorie), et encore moins les élever. Les propriétaires doivent en déclarer l'existence à la municipalité. Encore faut-il qu'ils disposent d'un casier judiciaire vierge et qu'ils soient majeurs. Mais même avec des papiers en règle, ils ne peuvent les promener dans les lieux publics.
La dangerosité du chien et l'aptitude du propriétaire sont évaluées a priori
Actuellement, certaines villes de la région francilienne forment leurs policiers au contrôle des molosses et de leur propriétaire, en espérant que cette pratique décourage plus d'un. Un policier explique le déroulement de la procédure :
« Quand on intervient aujourd'hui pour verbaliser un propriétaire indélicat, c'est compliqué. Déjà il faut déterminer la race, ce qui n'est pas évident avec tous les croisements. Il faudrait aussi vérifier si le détenteur a déjà été condamné, ce qui lui interdit d'avoir de nouveau un chien. Tout ça dans un contexte en général très tendu au milieu d'une cité. »
Concernant les chiens accueillis dans les refuges, ils subissent préalablement une diagnose avant qu'il ne soit possible de leur trouver une famille d'accueil. Dans le détail, cet examen consiste à s'assurer que l'animal en question ne compte pas parmi les chiens pouvant être qualifiés de dangereux. Il est réalisé par un vétérinaire.
De bons résultats à l'évaluation comportementale (appliquée depuis 2008) ouvrent la voie vers l'adoption. Quant au maître, il se voit attribuer un permis de détention après avoir assisté à une formation. Celle-ci lui permet d'interpréter le comportement de son compagnon à quatre pattes et de l'éduquer en conséquence.
À défaut de preuves statistiques, Claude Beata, qui préside une association de zoopsychiatres, préfère n'accorder aucun crédit à la loi régissant la détention de chiens dangereux. Un vétérinaire exerçant dans l'Oise éclaire justement sur la question de la dangerosité de ces animaux de compagnie :
« Ce qu'il faut comprendre c'est que ces chiens, qui ne sont pas intrinsèquement violents, sont entre de mauvaises mains la plupart du temps… Élevés en famille, ils ne sont pas plus dangereux qu'un autre. Mais avec des personnes mal intentionnées, ce sont des armes. »Un représentant de la Société Centrale canine (SCC) avance qu'un dressage intelligent permet de résoudre le problème, de manière à en faire des bêtes obéissantes.
Un marché rentable nécessitant des mesures plus contraignantes ?
Les organismes qui protègent les animaux consentent que davantage de molosses sont détenus dans les centres de refuge, comme le souligne Stéphane Lamart. Ce dernier est justement à la tête d'une association de ce type. Il souligne :
« Il ne se passe pas une semaine sans que nous tentions de récupérer une dizaine de molosses auprès des fourrières. »
Pour les chiens d'attaque (catégorie 1) et les chiens de garde (catégorie 2), la mise en fourrière totalise 133 interventions en moyenne par mois en 2019, contre 102 en 2017. C'est ce que révèle les chiffres relayés par Le Parisien, permettant de constater une augmentation de 30 % des cas de prise en charge de chiens dangereux.
Comme solution, Stéphane Lamart propose que les opérations de contrôles policiers soient consolidées et que les sanctions à l'encontre des contrevenants soient alourdies.
À l'heure actuelle, les propriétaires qui ne respectent pas la réglementation en vigueur encourent une amende qui oscille de 150 à 15 000 euros, ainsi qu'une peine d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 6 mois. Les autorités peuvent également confisquer l'animal à son maître ou lui défendre définitivement de posséder un chien, ce qui implique la résiliation du contrat d'assurance animaux.
Malgré les risques, le marché des molosses demeure particulièrement florissant, comme l'indique un responsable de fourrière. En se basant sur les témoignages d'un policier travaillant dans le département du Val-de-Marne et de Stéphane Lamart, il en ressort des motivations bien précises dans l'achat des molosses :
- Revente (parfois en ligne) des petits aux proches et aux connaissances en pratiquant des élevages clandestins, pouvant rapporter jusqu'à 15 000 euros annuels, avec des numéros d'identification douteux.
- Attitude ostentatoire constatée chez les jeunes de cité (promenant leur chien sans laisse), de manière à faire de l'animal un accessoire de mode pouvant être exposé dans un clip.
- Couverture d'un point de deal, alors même que le chien d'attaque n'a pas été dressé.