C’est une étude réalisée par le Comité logement de La Petite-Patrie, organisme qui milite pour les droits des locataires, qui a fait la lumière sur le sujet. Celui-ci rapporte que la majorité des expulsions d’un logement dans cet arrondissement fait suite à une démarche frauduleuse. Le suivi effectué par le Tribunal du Logement manquerait souvent.

Plus de 80 % des expulsions d’un logement se font de manière frauduleuse à Montréal

Le nombre de demandes de reprise de logement a connu une hausse de 40 % entre 2019 et 2020. Ces statistiques sont révélées par le Tribunal administratif du logement (TAL). Le Comité logement de La Petite-Patrie a ainsi tenu à vérifier si les propriétaires respectaient les motifs énoncés.

Les résultats de son enquête démontrent que, dans la majorité des cas, il s'agit d'un acte frauduleux. Certains prétendent vouloir occuper le logement, d'autres le rénover. Mais après vérification, on découvre que c'est rarement le cas. Face à ces démarches illégales, le locataire peut interpeller le TAL. En France, le refus de souscription d'une assurance locataire peut justifier une expulsion.

Des opérations qui visent pour la plupart les ménages modestes

À Montréal, la loi autorise les propriétaires à reprendre leur logement dans deux conditions. La première est qu'ils souhaitent y habiter ou le proposer à leur famille. La deuxième est qu'ils envisagent de réaliser des travaux de rénovation ou d'agrandissement. Selon le rapport du Comité logement de La Petite-Patrie, ils parviennent souvent à contourner ce cadre légal.


Les ménages les plus modestes sont les plus touchés par ces démarches frauduleuses, selon cet organisme. Il donne l'exemple d'une dame âgée, expulsée de son logement en échange d'une indemnisation de 4 200 dollars. Elle, qui louait l'appartement à 445 dollars par mois pendant 20 ans, a été contrainte de le quitter. Le propriétaire aurait envisagé d'agrandir l'immeuble.

Après avoir vérifié, le Comité Logement découvre que les travaux n'ont pas eu lieu. En revanche, l'appartement a été vendu, et à nouveau loué pour 1 590 dollars par mois.

La motivation des propriétaires serait généralement d'ordre pécuniaire. Selon le rapport de cet organisme de défense de droits des locataires, ils gagneraient facilement devant le Tribunal du logement, l'ancienne Régie du logement.

Un manque de suivi du Tribunal de logement

Le Comité logement dénonce les manquements au niveau du TAL, chargé de régler les différends entre les propriétaires et les locataires. Celui-ci effectuerait très peu de suivi après avoir donné son accord sur le projet qui lui est présenté.

Il arrive néanmoins que le Tribunal statue en faveur des locataires. Le Comité cite le cas d'un propriétaire contraint de verser un trop-perçu de 10 000 dollars à ses locataires. Prétendant vouloir occuper sa maison, il avait expulsé son ancien locataire, qui payait 1 025 dollars par mois. Puis il fit relouer son logement pour 1 650 dollars par mois.


Malgré la décision du Tribunal, la plupart des locataires préfèrent partir par peur des représailles, ou pour échapper aux harcèlements.

Selon l'enquête du Comité Logement, 85 % des cas d'expulsions sont ainsi effectués de façon illégale et malhonnête. Réalisée entre 2015 et 2020, l'étude s'est portée sur 363 logements dans La Petite-Patrie.

Denis Miron, porte-parole du Tribunal du logement, rappelle que :

Le locataire qui a subi une reprise ou une éviction faite de mauvaise foi peut réclamer des dommages-intérêts et même des dommages punitifs au locateur.