Fin septembre 2020, une enquête menée par la Cour des comptes concernant les politiques déployées pour lutter contre la pollution de l’air dans l’Hexagone a été publiée. Cette étude indique que la vignette Crit’air et le bonus-malus écologique n’ont aucune incidence sur la qualité de l’air. Elle révèle aussi que certains dispositifs sont même favorables à l’acquisition de voitures polluantes.

Il ne faut pas confondre bonus-malus écologique avec le système qui consiste à moduler les primes d'assurance d'un automobiliste suivant son comportement au volant. Le dispositif visant à taxer les voitures les plus polluantes pour favoriser l'achat de modèles plus verts ne s'intéresse qu'aux rejets de CO2. Ainsi, il n'a aucun effet sur l'amélioration de la qualité de l'air. C'est ce que révèle l'enquête menée par la Cour des comptes.
L'étude montre aussi que les filtres à particules entraînent davantage d'émissions de NOx. De con côté, l'AdBlue (adjuvant servant à purifier les moteurs diesel) est accusé de participer aux rejets d'ammoniac dans l'atmosphère.
Des dysfonctionnements majeurs
Dans son étude, la Cour des comptes explique que le malus automobile est l'unique dispositif qui concerne toutes les voitures neuves commercialisées en France. Au lieu de tenir compte des rejets de polluants, il est calibré sur les émissions de CO2. Or, le dioxyde de carbone n'est pas un polluant atmosphérique, mais un gaz à effet de serre. La juridiction déplore que le malus n'intègre que quelques critères portant directement sur la pollution de l'air malgré les diverses modifications qu'il a subies.
Par ailleurs, la Cour des comptes dénonce la classification Crit'air dont elle remet en question la pertinence. Elle pointe particulièrement les émissions de NOx des véhicules Euro 4 et Euro 5 dotés d'une motorisation diesel. Alors qu'elles ne traduisent pas fidèlement les rejets en conditions réelles de conduite, les normes Euro servent de base à la vignette Crit'air. La Cour en précise les conséquences :
Un véhicule diesel Crit'air 2 et correspondant à la norme Euro 5 émet ainsi en réalité la même quantité d'oxydes d'azote qu'un véhicule diesel Euro 4, classé Crit'air 3.
En somme, la classification actuelle n'informe pas les automobilistes sur les émissions réelles de leur voiture.
Plusieurs propositions pour améliorer la situation
La lutte contre la pollution de l'air tendant à stagner en France, la Cour des comptes souhaite que la mise en place de zones à faibles émissions soit accélérée. L'institution estime en effet que leur déploiement tarde à se concrétiser. Elle souligne :
Plus de dix ans après [les premières restrictions de circulation en France], seules trois ZCR sont mises en œuvre à Paris, dans quelques communes du Grand Paris ainsi qu'à Grenoble.
De plus, elle conseille de réviser la classification Crit'air en s'appuyant sur les rejets réels de CO2 et de polluants atmosphériques des véhicules. La juridiction précise que les émissions doivent être indiquées lors de la vente.
D'autre part, la Cour des comptes recommande une meilleure considération de toutes les externalités environnementales des automobiles, dont leur poids. Concrètement, elle veut que ce paramètre soit aussi pris en compte dans la taxation des voitures lors de leur immatriculation. Un tel système est par exemple déjà appliqué en Norvège.
Enfin, la juridiction préconise de reprendre l'alignement de la fiscalité du gazole avec celle de l'essence. Pour rappel, ce rééquilibrage a été entamé à la fin de l'année 2016. Seulement, il a dû être suspendu fin 2018 en raison de la crise des Gilets jaunes.