Dès 2020, les constructeurs automobiles seront contraints de respecter les nouvelles normes européennes en matière d'émissions de CO2. Mise en place face à l'urgence climatique, cette réglementation plus stricte privilégie ainsi les modèles électrifiés. Toutefois, la démarche imposée aux industriels tend à menacer les emplois dans le secteur. Détails !

Selon les professionnels, les nouveaux règlements en matière d'émissions de CO2 représentent une plus sérieuse menace pour le secteur, comparés à d'autres évènements tels que le Brexit ou la guerre commerciale sino-américaine.
En effet, dans un an, la limite, en termes d'émission de CO2, devra s'établir à 95 grammes par kilomètre. Tous les constructeurs devront se soumettre à ce plafond sur leur gamme de véhicules neufs.
D'après les analystes d'Euler Hermes, les constructeurs devront faire baisser le taux actuel de près de 20 % d'ici 2020, au risque de payer de lourdes amendes. Or, l'industrie automobile a mis une dizaine d'années pour réduire les émissions de 25 %.
Les marges des constructeurs menacées
Une fois la nouvelle norme appliquée, tout excès constaté sera sanctionné de 95 euros par gramme, multiplié ensuite par le nombre de véhicules vendus au sein de l'Union européenne. Les sanctions pourraient atteindre 1 milliard d'euros pour les contrevenants, selon Xavier Mosquet, un expert du cabinet de consulting BCG.
Après 2020, les sanctions risquent de devenir plus sévères et plus fréquentes. En effet, l'Europe appliquera une réduction de 15 % en plus sur le taux de CO2 à partir de 2025. La régression s'établira à 37,5 % en 2030.
Pour pouvoir respecter ces règles, les hybrides et les électriques devront représenter un quart des nouvelles immatriculations avant 2021, selon les calculs d'Euler Hermes. Autrement dit, le nombre de ce type de véhicules devra tripler par rapport aux chiffres actuels.
Or, ces résultats dépendent foncièrement des tendances dans le secteur. En effet, depuis deux ans, les consommateurs abandonnent le diesel pour se tourner vers les voitures essence et les SUV. Ainsi, les émissions de CO2 ont encore augmenté par rapport aux objectifs initiaux.
D'après l'équipe d'Euler Hermes, les technologies permettant de réduire les émissions des modèles actuels impliquent un surcoût de 7 % jusqu'à 2020 et près de 15 % en 2025. Par conséquent, les marges vont s'amenuiser si les constructeurs ne parviennent pas à amortir ces coûts. Cependant, s'ils envisagent d'augmenter leurs tarifs, les ventes de véhicules neufs baisseront inévitablement.
Ainsi, comme l'indique celui qui dirige le Center automobile research, Ferdinand Dudenhöffer :
« Les profits vont baisser et les actionnaires des groupes automobiles vont perdre de l'argent ».
Une transition forcée
Les véhicules propres et les modèles électrifiés commencent à accroître leurs parts de marché dans le secteur de l'assurance flotte automobile. Cette tendance reflète ainsi la période de transition traversée actuellement par l'industrie automobile au niveau mondial.
Pourtant, de leur côté, les constructeurs ne sont pas encore prêts. D'ailleurs, ils se montrent assez réticents en raison des investissements nécessaires et des risques pour leur activité. Outre la chute des bénéfices, les pertes massives d'emploi font notamment partie des craintes les plus répandues dans le secteur.
Afin d'adoucir la transition, quelques représentants du secteur automobile allemand ont réussi à faire ajuster le seuil des 95 grammes selon la masse des voitures vendues. Concrètement, les gros véhicules bénéficieront d'une petite marge supplémentaire sur leurs émissions.
Dans ce contexte, Toyota est la marque la plus vertueuse en Europe, suivi de Renault et de PSA. Ainsi, selon les spécialistes, les constructeurs français ne devraient pas avoir autant de difficultés que les Allemands Mercedes et BMW à se plier aux nouvelles normes.
En tout cas, les émissions de CO2 sont désormais la priorité de tous les acteurs du secteur d'après les experts automobiles.
Pour pouvoir relever ce défi, les constructeurs devront retirer du marché certaines de leurs motorisations actuelles, dont les modèles les plus polluants. Par ailleurs, ils seront contraints de proposer plus d'hybrides et d'électriques.
Comme le souligne l'analyste d'Alix Partners, Laurent Petizon :
« Les constructeurs avaient investi 25 milliards d'euros dans l'électrification sur ces huit dernières années, ça va être dix fois plus, 250 milliards, dans les huit prochaines ».