Les assurances habitation vont augmenter en 2024

Facture climatique « salée » en 2023, hausse des coûts de la réassurance, réévaluation des principaux postes de réparation des habitations, autant d'éléments difficiles à absorber pour les organismes d'assurance. Conséquence : ils sont contraints de rehausser les tarifs des assurances habitation en 2024.

Parce que les événements climatiques causent aux habitations des dommages pris en charge par les assurances, ils ont des incidences sur les bilans des organismes d'assurance et génèrent une inflation sur les primes. Si la France n'a pas subi de catastrophes climatiques majeures lors des trois premiers trimestres 2023, le dernier trimestre aura été le théâtre des tempêtes Ciaran et Domingos dont le montant à payer par l'ensemble des assureurs se chiffre à 1,3 Mrd €, selon France Assureurs, organisme représentant le secteur dans l'Hexagone. Il y a eu aussi des inondations dévastatrices dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais en novembre.

A ce stade, il est trop tôt pour connaître avec précision le coût global de la facture climatique à acquitter par les assureurs au titre de 2023 mais on sait qu'il sera plus élevé qu'en moyenne. D'ores et déjà, le coût global des événements climatiques survenus dans l'Hexagone en 2022 avait été élevé pour les assureurs, avec 10,6 Mrds € dont 2,9 Mrds € au titre de la sécheresse. Par comparaison, il était en moyenne de 3,6 Mrds par an sur la période 2011-2021.

Les assurances habitation vont augmenter en 2024

La main lourde de la réassurance

Autre élément qui entre en compte dans la fixation des tarifs des primes habitation : la réassurance, c'est-à-dire la possibilité qu'ont les assureurs de se couvrir eux-mêmes contre les risques auxquels ils s'exposent. En quelle que sorte, les réassureurs sont les assureurs des assureurs.

En ce qui concerne la couverture des biens, les prix de la réassurance sont en nette hausse depuis janvier 2023, des indexations autour de + 30 % ayant été appliquées l'an dernier aux assureurs parce que les réassureurs ont pour objectif d'améliorer leurs résultats financiers après plusieurs années peu favorables.

En assurance habitation, ces indexations seront répercutées au fur et à mesure par les assureurs, c'est-à-dire sur plusieurs années. En effet, les organismes ne peuvent pas trop pousser les augmentations sur une seule année : d'une part, la crise économique actuelle fragilise les budgets des ménages et il serait déloyal de la part des assureurs de ne pas tenir compte du contexte économique complexe. D'autre part, un assuré pourrait être tenté de se tourner vers la concurrence si le prix de son assurance habitation augmente fortement d'une année à l'autre. Selon une étude réalisée par Opinionway pour Eloquant et Efficy*, lorsque leur contrat subit une hausse, 69 % des Français y voient une raison de changer d'assureur et le contexte tendu de la hausse des prix actuelle renforce cette inclination.


Une inflation de + 4,9 % en 2023

L'inflation élevée – telle que nous la subissons en France depuis le second semestre 2022 – a aussi son lot de conséquences au regard de la fixation des tarifs des assurances habitation. Selon une note de conjoncture publiée le 14 décembre par l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), l'inflation a été évaluée à + 4,9 % en moyenne annuelle sur 2023 (estimation provisoire). Les assureurs eux-mêmes subissent la hausse de l'inflation, notamment parce qu'elle a des impacts sur le coût des réparations prises en charge par ces professionnels en cas de sinistre.

Les matériaux aussi

Dans une étude publiée en septembre dernier, Facts & Figures mentionne plusieurs indices relatifs au secteur de la construction qui font état de hausses substantielles en 2022 et en 2023. Ainsi, l'indice Insee du coût de la construction a subi une hausse de + 6,6 % en 2022 et a crû de + 2,3 % au premier semestre 2023. De même, ce cabinet conseil spécialisé en assurance recense l'envolée des prix de certains matériaux (vitrerie-miroiterie : + 16,7 % en 2022 ou tuiles en terre cuite : + 9,1 % en 2022), envolée qui s'est poursuivie en 2023 et a des impacts sur les charges des sinistres des assureurs.

Facts & Figures estime que « Malgré une baisse de la fréquence des incendies et des dégâts des eaux de - 9,1 % en 2022 par rapport à 2021, le coût moyen [des] dommages a augmenté de + 6,4 %, notamment à cause de l'inflation du coût des matières premières utilisées dans la réparation des sinistres ».


Hausse insuffisante en 2022

Face à la recrudescence des risques, les organismes d'assurance n'ont d'autre choix que de tirer les prix vers le haut. Les Français ont payé en moyenne 268 € hors taxes pour leur assurance habitation en 2022, selon France Assureurs. Cette même année, la prime moyenne d'une maison individuelle s'élevait à 400 € hors taxes et elle était de 190 € hors taxes pour un appartement. Les primes avaient progressé en moyenne de + 2,4 % par rapport à 2021, leur montant variant en fonction du type de résidence (maison, appartement) et d'occupation (propriétaire occupant, locataire, résidence secondaire, etc.). Mais la hausse appliquée sur les primes en 2022 n'a pas suffi à compenser l'augmentation des charges des organismes d'assurance pour réparer les dégâts causés par les sinistres.

Sinistres à gogo

Sur l'année 2024, Facts & Figures table sur une croissance de + 6 % des tarifs des assurances habitation. Toutefois, cette estimation ayant été réalisée avant le dernier trimestre 2024 et la survenue des tempêtes Ciaran et Domingos et des inondations dans le Nord et le Pas-de-Calais, l'indexation devrait être plus importante.

De son côté, le cabinet d'actuariat Addactis prévoit en 2024 une hausse des tarifs en assurance habitation de + 6,5 % à + 7,5 % pour la prime « pure », c'est-à-dire avant la prise en compte de l'évolution des dégâts des eaux, des vols et de l'occurrence des incendies sur les années précédentes. Or, les dégâts des eaux et les incendies ont tendance à devenir plus fréquents sur le long terme.


Toujours selon Addactis, à partir d'une base 100 établie pour l'année 2009 et si l'on anticipe l'année 2024, les dégâts des eaux devraient enregistrer un indice 155, le vol devrait être quasiment stable, évoluant vers un indice 102, et les incendies devraient voir leur indice atteindre 138. Les dégâts des eaux représentent en effet les sinistres les plus fréquents (36 % de l'ensemble des sinistres en assurance habitation). Avec 211 400 cambriolages comptabilisées, le ministère de l'Intérieur a annoncé une hausse de + 11 % de ces infractions en 2022, après une stabilisation de leur nombre en 2021 en raison de la pandémie et des confinements (présence à domicile plus fréquente).

Lorsque les chiffres de l'année 2023 auront été communiqués en matière de cambriolages, on pourra connaître l'éventuelle répercussion de ces risques sur les primes habitation.

Accepter ou résilier

Si l'on ajoute les + 2 % à + 3 % imputables à la dérive climatique, la hausse des primes d'assurance habitation pourrait bien être comprise entre 8,5 % et 10,5 % en 2024. Au final, dans un secteur soumis à une forte pression concurrentielle, demander des devis à d'autres organismes pour les assurés dont la facture subit une forte revalorisation pourrait faire baisser la note, alors qu'une réglementation effective depuis juin 2022 - la résiliation en trois clics – a vu le jour afin de faciliter le changement de contrat en cours d'année.

*Etude menée du 20/09/2023 au 21/09/2023 par questionnaire auto-administré en ligne auprès d'un échantillon de 1009 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, constitué selon la méthode des quotas