
En Alsace-Moselle, les choses sont quelque peu chaotiques entre la généralisation de la complémentaire santé et un régime spécial, en place depuis 70 ans dans les trois départements (Bas-Rhin, Haut-Rhin et Moselle). La réforme a été repoussée au 1er juillet 2016 pour cette région, le temps de rédiger un décret censé permettre son application. Le projet de texte vient cependant d'être rejeté par le régime spécial.
Une date d'application déjà repoussée
Déjà, début 2016, la date d'application de la généralisation de la complémentaire santé avait été décalée au 1er juillet 2016 pour l'Alsace-Moselle. Rappelons-le, cette généralisation impose aux entreprises du secteur privé de proposer à leurs salariés une complémentaire santé obligatoire avec des garanties minimales et une prise en charge financière partagée de moitié au minimum. Elle est appliquée pour le reste de la France depuis le 1er janvier.
Repousser l'application devait laisser le temps de trouver une solution adéquate. En effet, si le conseil d'administration du régime local d'Assurance Maladie d'Alsace-Moselle rejette la complémentaire santé, c'est qu'elle mettrait les bénéficiaires dans une situation d'inégalité vis-à-vis du reste de la France. Selon Daniel Lorthiois, le président du régime, les salariés devront financer 86% de leur complémentaire, contre 50/50 dans les autres régions. On comprend le problème.
Deux scénarios s'opposent
Deux scénarios, deux solutions au conflit entre généralisation de la complémentaire et régime spécial s'opposent :
- Le conseil d'administration soutient l'alignement des prestations du régime local sur celles du « panier de soins minimum », introduit par la loi du 14 juin 2013.
- D'un autre côté, une mission parlementaire composée de quatre députés souhaite faire de la réforme une troisième couverture au-dessus du régime local. En effet, les bénéficiaires disposent déjà d'un régime autonome complémentaire au régime général, auxquels la réforme viendrait encore s'ajouter. Mais, dans ce cas de figure, la participation employeur (minimum de 50%) ne s'appliquerait, par conséquent, que sur les 28% de prestations non couvertes par le régime local. Les salariés, ainsi, financeraient 86% de la cotisation complémentaire santé globale contre seulement 14% aux employeurs.
Rejet du décret tant attendu
Encore au stade de projet de texte, soumis aux responsables du régime local, le décret qui devait permettre l'application de la généralisation de la complémentaire santé a d'ores et déjà été rejeté par le conseil d'administration à une écrasante majorité : 20 sur 25 ont voté contre. Basé sur le scénario préconisant la mise en place d'une troisième couverture, le décret ne permettrait toujours pas l'égalité entre les bénéficiaires : « Cette différence de traitement constituera une rupture d'égalité qui entraînera inévitablement des contentieux juridiques avec un risque de questions prioritaires de constitutionnalité » explique Daniel Lorthiois.
Quoiqu'il en soit, il faudra bien trouver un consensus d'ici au 1er juillet...