Les radars embarqués vont bientôt fleurir sur nos routes. Leur privatisation pourrait permettre à des salariés de sociétés privées de s'improviser policier en flashant les automobilistes depuis des voitures-radar banalisées. Le projet, pourtant en test, est loin de faire l’unanimité...

La décision n'est pas nouvelle puisqu'elle avait été annoncée en octobre 2015, par Manuel Valls. Depuis, 6 voitures ont été mises en circulation à Evreux (dans l'Eure). Le premier septembre prochain, ces voitures équipées d'un radar seront aussi déployées en Normandie, avant de s'étendre dans tout l'Hexagone.
Pourquoi privatiser ?
Initialement prévue en janvier dernier, la privatisation des radars embarqués commence à se mettre en place. D'aucuns pourraient se demander pourquoi privatiser une telle pratique, traditionnellement réservée aux gendarmes et policiers. Le gouvernement a pris cette décision dans l'optique de « libérer du temps de travail pour les forces de l'ordre (équivalentes à 400 emplois temps plein), qu'elles consacreront à des tâches plus en rapport avec leur qualification au profit de la lutte contre l'insécurité routière, comme la recherche des conduites en état d'ivresse ou après prise de stupéfiants, la lutte contre la délinquance et la protection de la population . Elle permettra également d'augmenter le temps d'usage des voitures-radar afin d'assurer un meilleur respect des limitations de vitesse sur l'ensemble du réseau ». Voilà comment l'Etat justifie la privatisation des radars embarqués.
Des appels d'offres déjà lancés
Le recrutement de chauffeurs privés a d'ores et déjà commencé. Le ministère de l'Intérieur a lancé des appels d'offres auprès de sociétés privées. Mais, les entreprises ne pourront pas faire ce qu'elles veulent. Elles devront suivre un parcours « spécifiquement cartographié par l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN). (...) Les trajets effectués ainsi que les plages horaires de contrôle seront fixés par les services de l'État en fonction des critères d'accidentalité locale et ne seront en aucun cas laissés à la libre appréciation des entreprises ou de leurs conducteurs.(...) En aucun cas les entreprises ne seront rétribuées au nombre d'infractions enregistrées », au moins en ce qui concerne les premiers essais en Normandie.
Pour apaiser les Français, le gouvernement assure que « l'entreprise désignée ne pourra être intéressée au montant des amendes et aucune prime ne sera indexée au nombre de flashs . Les véhicules confiés à l'entreprise titulaire du marché resteront pour leur part la propriété de l'État ». L'exécutif veut être aussi clair sur un point : « Il ne s'agit bien évidemment en aucun cas de déléguer à des sociétés privées des compétences régaliennes ». Mais toutes ces déclarations ne suffisent pas à faire taire bon nombre d'automobilistes en colère.
78% des Français se disent « opposés »
D'après une étude d'Harris Interactive, 78% des Français sont opposés à la privatisation des radars embarqués. Ils étaient 83% il y a un an. C'est en s'appuyant sur cette étude que l'association 40 Millions d'automobilistes a décidé de mettre en place une « manifestation numérique ». Ainsi, l'association a le désir de « faire reculer le gouvernement » en encourageant les automobilistes à « envoyer une photo d'eux ou de leur voiture directement par MMS à Pierre Chasseray, délégué général de l'association, au 07 89 99 63 63 ou via le site www.nonalaprivatisationdesradarsembarques.com » .
Selon Daniel Quero, président de 40 Millions d'automobilistes, «la privatisation des radars embarqués n'a d'autre but que de générer, grâce aux amendes issues des contraventions, d'importantes sommes d'argent qui finiront dans les caisses de l'État […] En revanche, il n'existe aucune preuve que cette mesure ait un quelconque effet positif sur la sécurité routière ».
Une mesure qui n'a donc pas fini de faire couler de l'encre et d'opposer, une nouvelle fois, le gouvernement et les associations d'automobilistes.