En Suisse, il n'existe désormais plus aucune distinction entre conduite manuelle et automatique lors du passage de l’examen du permis de conduire. Adopté par le Conseil fédéral le 14 décembre 2018, ce changement est entré en vigueur au 1er février dernier. Une situation qui fait craindre des pertes de CA aux auto-écoles.

Les auto-écoles redoutent qu'avec le changement de législation, les candidats au permis de conduire choisissent la facilité en passant l'examen avec une voiture munie d'une boîte de vitesses automatique.
Philippe Schumacher, moniteur à Genève, indique que cela induira forcément un manque à gagner étant donné que les heures de cours dispensées diminueront.
Jusqu'alors, la conduite automatique n'était choisie que par une minorité de candidats. Il s'agit surtout d'élèves qui ont du mal à gérer le passage de vitesses ou l'embrayage. Les jeunes conducteurs provenant de pays dans lesquels les voitures à boîte manuelle sont quasiment absentes sont aussi intéressés par ce permis.
Les auto-écoles risquent d'augmenter leurs tarifs
Désormais, les permis de conduire délivrés en Suisse ne mentionnent plus s'ils ont été acquis avec une voiture automatique. Il est aussi possible pour les élèves éprouvant des difficultés à changer de rapport de vitesse de conduire un véhicule muni d'une boîte manuelle.
La FREC (Fédération romande des écoles de conduite) appréhende ce changement. Selon elle, les élèves risquent d'en pâtir. Son directeur Jean-Bernard Chassot alerte :
« Le prix des leçons devrait finalement augmenter car ces changements auront une incidence sur les finances des auto-écoles ».
De lourds investissements s'annoncent pour les écoles de conduite. L'augmentation du nombre d'élèves optant pour la conduite automatique nécessite en effet l'achat de nouveaux véhicules. Daniel Gueissat, gérant d'une auto-école située en Lausanne, explique :
« Les grosses auto-écoles, déjà équipées, n'ont pas ce problème, mais ce sera surtout pour les plus petites structures que ce sera difficile, car peu font déjà de l'automatique. Ces moniteurs vont exploser leurs charges ».
Étant en général plus modernes, les voitures à boîte automatique coûtent plus cher à l'achat. De plus, les moniteurs devront encore les faire modifier pour qu'elles soient munies de doubles pédales.
Le permis devient moins long à obtenir
L'assurance d'une voiture automatique peut être plus ou moins chère que celle d'une voiture manuelle. À noter que les assureurs tiennent davantage compte du modèle du véhicule et du profil de l'assuré que du type de boîte à vitesses.
Conduire une voiture automatique n'affecte donc pas le prix d'une assurance auto jeune conducteur. En revanche, si l'achat de ce type de véhicule se rapporte à une restriction de permis, le montant de la prime sera forcément plus élevé.
Une auto-école de Genève indique que le changement de législation a été anticipé par certains élèves qui ont alors décidé de passer leur examen en conduite automatique. Selon Daniel Gueissat, cela permet d'obtenir le permis plus rapidement. Il explique :
« Cela prend en moyenne une heure et demie à deux heures pour apprendre à maîtriser l'embrayage et la boîte de vitesses. Mais il y a encore toute la phase de coordinations des mouvements et d'anticipation à assimiler. C'est cette période qui est souvent la plus longue à accomplir ».
Cependant, le spécialiste estime que les jeunes conducteurs peuvent le faire eux-mêmes ou avec l'assistance d'un proche, une fois le permis obtenu.
Des préoccupations relatives à la sécurité ont été soulevées
Les professionnels peinent à croire qu'un jeune ayant obtenu son permis suivra des cours supplémentaires pour apprendre à maîtriser une voiture manuelle. Philippe Schumacher indique :
« Il y aura peut-être une infime minorité qui le fera. La majorité pensera très certainement qu'elle est capable d'apprendre avec sa famille, son copain ou sa copine. Il va y avoir de la tôle froissée ».
Pour l'OFROU (Office fédéral des routes), la sécurité routière représente la première préoccupation avec l'entrée en vigueur du changement. Son porte-parole, Guido Bielmann, confie :
« Les auto-écoles ont été consultées et elles ont pu s'exprimer au cours de la table ronde. Nous comprenons leurs craintes concernant leur chiffre d'affaires mais notre priorité était la sécurité routière et le bon apprentissage de la conduite. Les véhicules actuels ont de nouvelles assistances auxquelles il faut s'adapter lorsqu'on change de voiture. Le changement de vitesses est un détail parmi d'autres ».