En France, comme un peu partout dans le monde et notamment dans les pays développés, les applications mobiles de santé mentale sont si nombreuses que les utilisateurs ont l’embarras du choix. Et avec les différents services qu’elles ont à proposer, elles peuvent être d’un grand secours. Mais tout comme les médailles, elles ont leur revers.

La santé mentale est un domaine qui relève une compétence particulière que seuls les psychiatres peuvent maîtriser. Seulement, ils sont très peu nombreux et mal repartis sur le territoire qu'il est parfois difficile de les contacter.
Pour rattraper le coup, les applications mobiles traitant le sujet ont immergé. Plus que de simples sources d'informations et de données précises, ces dernières peuvent effectuer des diagnostics ou des suivis réguliers. Ce qui explique d'ailleurs leur essor fulgurant qui s'est effectué ces dernières années.
Tout cela, pour dire que ces systèmes ont tout pour séduire. Toutefois, force est de constater qu'ils ne sont pas sans risque ne serait-ce que de tenir en compte le fait qu'un sujet aussi sensible puisse être confié à un robot d'autant que leur fiabilité reste à prouver.
Des solutions intermédiaires à la rescousse
Si les applications sur la santé mentale connaissent actuellement le succès auprès des utilisateurs, c'est parce qu'elles se présentent comme des solutions intermédiaires face à l'indisponibilité accrue des psychiatres et au déséquilibre de leur répartition territoriale. À Jean Marsac, ancien chef de service à l'AP-HP, spécialiste de la prévention santé connectée de préciser :
L'appli ne remplace pas l'humain, mais c'est une solution intermédiaire. On manque cruellement de psychiatres et les généralistes n'ont pas le temps d'écouter un patient qui se plaint de troubles psychiques.
Ainsi, différents systèmes ont immergé afin d'aider tous ceux sujets aux maux psychiques, à la dépression, au TOC, aux addictions, au trouble bipolaire ou encore à un simple coup de mou. Et puisqu'il en existe des milliers, ils visent diverses finalités qui peuvent être catégorisées en quelques lignes :
- Ceux qui informent sur l'état du patient : soit de façon active, en permettant de noter sa météo intérieure. Soit de façon passive, avec un suivi de sa tension, son rythme cardiaque, sa température, son sommeil ;
- Ceux qui proposent l'éducation thérapeutique et la prévention ;
- Ceux qui proposent une intervention ou des exercices de relaxation ;
- Ceux qui enclenchent un protocole en cas d'urgence pour contacter un proche, un médecin, les urgences ;
- Ceux qui permettent de trouver l'adresse de la pharmacie la plus proche.
À Xavier Briffault, chercheur en sciences sociales et en épistémologie sur la santé mentale au CNRS d'ajouter :
Ces applications permettent aussi d'observer tout le temps, d'intervenir partout donc d'étendre le périmètre de la consultation.
Bénéfiques, mais pas sans risques
Telles une mutuelle santé ou une assurance maladie, les applications mobiles de santé mentale représentent beaucoup d'avantages pour certains patients. Toutefois, elles ne sont pas sans risque.
Dans ce sens, on pourrait par exemple énumérer la confidentialité des données personnelles qui peuvent être utilisées à d'autres finalités. À Xavier Briffault d'illustrer :
Les GAFA peuvent se les approprier dans le but de faire de la publicité ciblée. Par contre, que mon assureur sache tout de moi et commence à changer ses tarifs si je marche beaucoup, je mange des burgers ou je prends des antidépresseurs, c'est davantage un problème.
On pourrait également citer leur fiabilité si l'on tient compte du fait que très peu d'entre elles sont validées scientifiquement. C'est une situation qui a d'ailleurs été prouvée par une étude menée par l'Université de Valladolid qui a démontré que sur les 1 500 applications consultées, seules 32 s'appuyaient sur des données scientifiques si les autres proposaient des conseils erronés ou dramatiques. Au docteur Marsac d'ajouter :
Il y a des applications très dangereuses sur le plan de l'évaluation. Surtout si on donne à quelqu'un seul devant son écran un diagnostic de maladie mentale sans savoir comment il va réagir.
S'ajoutant à cela, le fait que les utilisateurs oublient le fait qu'il s'agit d'une solution intermédiaire pour compléter les services du psychiatre. Une situation qui les incite à mettre de côté les médicaments prescrits par ce dernier.