Assurance : faut-il déclarer tous ses sinistres auto ?

Ne pas jouer selon les règles avec l’assureur est potentiellement dangereux. Les assurés doivent déclarer tous leurs sinistres au risque de se retrouver dans de graves difficultés si la non déclaration remonte aux organismes d’assurance.

Lors d’un accident, d’un accrochage, ou d’une dégradation, il peut être tentant de taire à l’assureur les dommages causés à son véhicule en s’abstenant d’établir une déclaration de sinistre. Le but, lorsque l’assuré est responsable, est d’éviter de subir une majoration de la prime d’assurance, avec notamment le système du «malus», ou une résiliation du contrat par l’assureur. Il convient néanmoins d’être prudent et de bien avoir en tête les conséquences de ce type de «cachoteries» aux organismes d’assurance.

La déclaration de sinistre est obligatoire

Même sans dommages causés à des tiers engageant la responsabilité un sinistre automobile peut causer des dommages matériels au véhicule ainsi que, plus grave, des dommages corporels aux conducteurs et passagers. L'assurance est prévue pour indemniser les sinistres, encore faut-il que l'assureur soit prévenu. Faut-il déclarer tout sinistre automobile lorsqu'on est assuré ? La réponse est oui. La loi est claire à ce sujet en précisant que l'assuré doit prévenir l'assureur, dès qu'il en a eu connaissance et au plus tard dans le délai fixé par le contrat, de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de l'assureur. Ce délai est de 5 jours ouvrés, ramené à 2 jours ouvrés en cas de vol (article L113-2 du Code des assurances).


«Concrètement, dès que la garantie de l'assuré est susceptible d'être engagée, celui-ci doit déclarer un sinistre sans distinction – responsabilité civile ou dommage-. Par exemple, cela signifie qu'un assuré qui n'a pas souscrit la garantie bris de glace n'est pas tenu d'établir une déclaration de sinistre lorsque son pare-brise est détruit. En revanche si l'assuré a souscrit la garantie bris de glace, il est tenu de déclarer le sinistre à son assureur si son pare-brise est cassé », explique Nicolas Ciron, avocats associés de NCS Avocats.

Sanctions en cas de non-déclaration

Qu'il s'agisse d'un petit accrochage ou d'un accident plus grave, l'assureur non prévenu peut résilier le contrat d'assurance, dès lors qu'il apprend la survenance du sinistre, et déclencher ainsi un «fichage» de l'automobiliste à l'Association de Gestion des Informations sur le Risque en Assurance (AGIRA). Le fichier AGIRA permet de communiquer à toutes les sociétés d'assurance automobile les informations liées aux risques que peut représenter potentiellement un conducteur. Les informations sont conservées dans le fichier pendant 5 ans si la résiliation fait suite à un sinistre.

Le jeu est potentiellement dangereux car, sans forcément procéder à des recherches très poussées, les assureurs arrivent à détecter les non-déclarations de sinistres. Certaines situations sont plus faciles que d'autres.


«Par exemple, dans le cas d'un dommage au tiers, le conducteur responsable a plus qu'intérêt à déclarer le sinistre compte tenu des montants d'indemnisation pouvant entrer en jeux, parfois plusieurs millions d'euros. Ne pas le faire, c'est prendre le risque de se voir opposer une déchéance de garantie. Concrètement, l'assureur va indemniser la victime avant de demander à son assuré de rembourser les indemnités versées», explique Nicolas Ciron.

Dans d'autres situations, l'assuré peut se croire à l'abri mais c'est sans compter le comportement indélicat de la «victime». «Par exemple, lorsque deux véhicules sont impliqués et que l'accident n'est pas grave, le responsable propose, sans établir de constat, de donner une certaine somme d'argent à la victime pour qu'elle fasse directement réparer les dégâts. Celle-ci accepte mais il arrive qu'elle décide de déclarer tout de même le sinistre à son assureur. L'assuré responsable peut ainsi se retrouver piégé et être résilié par sa compagnie pour non déclaration», explique Yannick Moine, spécialiste en assurance auto.

A ce niveau, rappelons que lors d'un sinistre automobile, l'assuré doit, entre-autre, transmettre le constat amiable et aviser en cas de vol les autorités de police ou de gendarmerie. Si le sinistre n'est pas déclaré dans les délais prévus (sauf cas de force majeure) et si ce retard a causé un préjudice à l'assureur, ce dernier pourra invoquer la déchéance de garantie.


Danger en cas de changement d'assureur

Pour les assureurs, la non-déclaration de sinistres peut s'apparenter à une fraude qui aura un impact sur les résultats du rapport sinistres sur primes. Pour être plus précis, l'assureur se base sur la fréquence des sinistres pour élaborer sa tarification. Le fait de ne pas déclarer des sinistres fausse ses statistiques. L'assureur s'estime trompé par l'assuré d'où la justification des sanctions.

L'assuré résilié pour une sinistralité jugée excessive, pourra avoir du mal à trouver de nouvelles couvertures. Il convient de rappeler que si aucun assureur n'accepte d'assurer un véhicule, l'automobiliste est en droit de saisir le Bureau central de tarification (BCT).Ce dernier a la faculté d'obliger un assureur à l'assurer pour la garantie obligatoire de responsabilité civile. Le BCT fixera alors le tarif du contrat. Par ailleurs, il existe sur le marché des opérateurs qui se sont spécialisés sur la population des conducteurs résiliés ou «malussés», voire ayant vu leur permis retiré. Le problème, dans tous les cas, viendra de la tarification qui sera élevée. On peut, lorsque l'on se retrouve dans cette situation, comprendre les intentions de l'assuré, au risque de voir le sinistre remonter à la surface avec toutes les répercussions qui s'en suivent.

Mieux négocier sa garantie dommages

Pour éviter les résiliations dans le cadre d'une non déclaration de sinistre, il est préférable de prendre le problème à la base en interrogeant le client sur les garanties qu'il souhaite obtenir. Si le client n'est pas assuré, par exemple, pour le bris de glace, il n'aura pas à faire jouer la garantie de l'assureur. «D'une autre manière, il possible aussi de passer par le système des franchises* en augmentant leur montant», relève Nicolas Ciron. A condition que ce type de négociation soit possible. En conclusion rien ne sert de s'assurer si c'est pour ne pas utiliser l'assurance.

*La franchise est la somme qui reste à la charge de l'assuré après l'indemnisation de l'assureur.